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Discussion EIOPA sur le traitement prudentiel des risques de durabilité

09/02/2023

Les organismes d’assurance, en tant qu’investisseurs long terme dans l’économie réelle, sont particulièrement concernés par les risques de durabilité, notamment ceux liés au climat. A ce titre le superviseur européen souligne l’importance d’une approche fondée sur l’analyse des risques pour prendre en compte les risques liés à la durabilité dans un cadre prudentiel. Si les difficultés sont nombreuses (accès aux données, référentiels et classifications encore perfectibles, déclinaisons opérationnelles non exhaustives, etc.), elles ne doivent néanmoins pas empêcher les organismes assureurs de se saisir de ce sujet majeur.

Le 29 novembre dernier, l’EIOPA a publié un document qui donne des orientations pour mesurer le risque de durabilité.

Il s’articule autour de trois axes :

  • La projection des risques d’actifs ;
  • La projection du risque de souscription ;
  • La projection des risques sociaux.

En parallèle, elle a lancé début décembre une nouvelle discussion avec le marché sur le traitement de ces risques. Elle prend la forme d’une enquête (82 questions) dont les réponses sont attendues d’ici le 5 mars : Enquête Prudential_Treatment_of_Sustainability_Risks.

Quelles projections sur les risques d’actifs ?

Dans sa publication, l’EIOPA ne retient pas le risque physique sur les investissements, faute de données (ie. l’implantation géographique exhaustive d’une entreprise à travers ses différents sites, stratégies d’entreprises pour se prémunir de risques climatiques, etc.).

En revanche, les nombreux travaux menés sur la place sur le risque de transition ces dernières années sont tels que le superviseur considère qu’il convient désormais de commencer (si ce n’est déjà le cas) à en quantifier les effets sur le besoin en fonds propres économiques.

En l’état actuel des connaissances et données disponibles, l’EIOPA considère que les actions, obligations et immobilier représentent les principales classes d’actifs concernées par la durabilité.

Partant du constat que l’utilisation des indices de marché existants ne permet actuellement pas de disposer d’une information suffisante pour évaluer le risque de durabilité, l’EIOPA propose deux approches alternatives de classification des actifs sur la base de leur exposition au risque :

  • Sectorielle : basée sur l’activité économique de la compagnie ;
  • Environnementale : basée sur des variables environnementales spécifiques à la compagnie, par exemple le niveau d’émission des gaz à effets de serre.

Le document ouvre également la discussion sur les données qui peuvent aider au calibrage de ces approches. On peut ainsi citer sur l’immobilier l’évaluation de la performance énergétique des bâtiments (DPE en France par exemple).

Quelles projections sur les risques de souscription ?

Un focus est porté sur la prévention. Il est considéré que l’industrie de l’assurance doit contribuer à aider les sociétés et les économies à s’adapter au changement climatique en modifiant leurs pratiques de souscription. A titre d’exemple, la présence de portes ou de murs capables de contenir l’eau en cas d’inondations pourrait réduire le prix de la police d’assurance.

L’EIOPA souhaite également l’avis du marché sur l’évolution de la Formule Standard. Des données seront collectées au deuxième trimestre 2023 pour mesurer l’impact sur le risque de primes. Une analyse qualitative sera également menée pour mesurer les impacts sur les risques de provisions et de catastrophes.

Il serait pertinent d’intégrer les risques sociaux dans le Pilier 1, mais comment les modéliser ? Leur diversité rend également difficile d’estimer l’ensemble des impacts possibles.

 

Une idée naturelle serait de se baser sur le cadre prudentiel existant, mais tous les concepts sous-jacents ne peuvent pas s’appliquer aux risques sociaux. Et il est difficile de concevoir des scénarii représentatifs et exhaustifs permettant de mesurer ce type de risque.

A défaut du Pilier 1, l’EIOPA propose ainsi d’intégrer les risques sociaux dans le Pilier 2, via la gouvernance et la gestion des risques, et dans le Pilier 3 via le reporting et les exigences de communication.

Si vous souhaitez en savoir plus sur la manière de traduire les risques climatiques en risques prudentiels, nos experts sont également à votre disposition pour vous éclairer.

Cet article a été rédigé par nos experts :

Thibaut GILLIARD
Director, Deputy Head of Modeling & Finance

Romain NOBIS
Senior Consultant
Modeling & Risk

Annabelle GARRIGUE
Senior Manager
Modeling & Risk