Le changement climatique s’impose comme l’un risques majeurs auxquels le monde est confronté aujourd’hui, créant de nouvelles exigences pour les assureurs afin de comprendre l’impact financier du risque climatique sur leurs activités.
De manière opérationnelle, les assureurs doivent régulièrement produire des projections d’actifs et de passifs pour répondre aux exigences de l’évaluation interne des risques et de la solvabilité (ORSA). Cela crée un besoin de définition et d’analyse de scénarios pour quantifier l’impact financier du risque physique et de transition.
Dans cette production de scénarios, il est nécessaire de tenir compte de la complexité et du caractère unique de leur modèle d’entreprise assurantielle des deux côtés du bilan, ainsi que dans leurs opérations commerciales.
Les assureurs doivent améliorer leurs approches de modélisation pour mieux évaluer le risque climatique. Il est fondamental d’examiner la situation de manière holistique, tant du côté des investissements que du côté du portefeuille d’assurances, et d’un point de vue des risques transitoires et physiques.
Chez Addactis®, nous accompagnons les assureurs sur les trois principales priorités de l’industrie en ce qui concerne les scénarios climatiques :
- La prise de conscience et la responsabilité des actuaires, risk managers et instances dirigeantes
- La capacité à correctement appréhender le risque climatique dans toute sa complexité
- La qualité des données et des modèles utilisés en relation avec le risque climatique
Comprenons-nous suffisamment les risques liés au changement climatique pour pouvoir les intégrer dans la modélisation ?
L’intégration du changement climatique dans la modélisation est un concept relativement nouveau et c’est une tâche particulièrement ardue.
Les scénarios de changement climatique couvrent un vaste spectre, et la modélisation des réponses possibles d’atténuation, d’adaptation et de changements de comportement des assurés ajoute plusieurs degrés de complication.
L’un des principaux défis à relever provient du degré élevé d’interdépendance entre les différents facteurs climatiques, ce qui rend difficile l’examen de chaque facteur pris isolément.
Les tests de scénarios pour le changement climatique sont-ils plus difficiles que pour d’autres risques ?
Actuellement, les tests de résistance traditionnels et l’analyse de scénarios s’avèrent souvent assez simplistes, contrairement aux scénarios climatiques qui sont complexes et plus riches car ils tiennent compte des changements structurels majeurs de l’économie mondiale.
Par ailleurs la modélisation du risque de transition est bien plus difficile que celle du risque physique. Au début de nos recherches il y a quelques années, nous avons commencé à un niveau général (à la maille pays puis département); cela s’apparentait à un scénario macroéconomique. Au fil du temps, nous avons constaté que pour obtenir des résultats significatifs – en particulier pour le risque de transition – vous devez rendre les scénarios beaucoup plus spécifiques, sinon les scénarios ne génèrent pas suffisamment d’informations. Nous développons désormais des scénarios spécifiques, que nous pouvons ensuite combiner de différentes manières.
La nécessité de comprendre les expositions futures et les impacts indirects s’avère tout aussi cruciale que l’examen des risques liés au climat.
Qu’entendez-vous par « Impacts indirects » ?
Les facteurs climatiques les moins évidents à appréhender incluent les changements de comportement des personnes en réponse au changement climatique.
Les conditions météorologiques extrêmes peuvent par exemple forcer des populations à migrer, entraînant une augmentation de la densité démographique en zone urbaine. Les demandes accrues sur les services de santé locaux dans ces régions peuvent devenir problématiques.
Une densité de population plus élevée pourrait également faciliter la propagation des maladies infectieuses dans ces territoires. A contrario, la migration pourrait dans certains cas être bénéfique. Par exemple, une population déplacée par le climat pourrait compléter la main-d’œuvre d’un pays bénéficiaire, soutenant peut-être une population vieillissante.
Si les économies abandonnent les combustibles fossiles, la qualité de l’air devrait s’améliorer, ce qui signifie que les gens souffriraient moins de conditions aggravées par la pollution telles que les crises cardiaques, les accidents vasculaires cérébraux, l’asthme et les maladies pulmonaires.
Les experts avertissent également que des conditions météorologiques extrêmes pourraient entraîner de mauvaises récoltes, ce qui pourrait occasionner des pénuries alimentaires.
Le changement climatique exercera une pression sur les habitats de diverses espèces et pourrait les forcer à migrer. Cela pourrait affecter la transmission de maladies à transmission vectorielle (telles que le paludisme) qui se propagent par des insectes, et l’émergence de maladies zoonotiques qui se propagent entre les animaux et les humains. Cela pourrait déclencher de nouvelles épidémies voire pandémies.
La tendance aux températures extrêmes variera selon le lieu, car le changement climatique rendra certaines parties du monde plus sèches et plus chaudes, tandis que d’autres pourraient devenir plus froides et plus humides.
Il faut garder à l’esprit que d’un point de vue mondial, les populations assurées correspondent généralement à des individus plus riches et qui sont en capacité de se protéger des vagues de chaleur, atténuant ainsi une partie de l’exposition aux risques potentiels.
Selon vous, quelles sont les étapes que l’industrie de l’assurance doit franchir pour améliorer sa réponse au changement climatique ?
Il est difficile de transposer l’ensemble des connaissances acquises en modélisation climatique au sein de la modélisation actuarielle et du capital. L’une des principales difficultés provient du fait que les articles de recherche sur le climatique se concentrent sur 20, 30, 40 ans, qui est l’échelle de temps à laquelle vous pouvez voir les effets du réchauffement climatique. Mais cette échelle de temps est très éloignée de la vision sur un an que les acteurs de l’assurance adoptent dans la modélisation du risque non-vie pour les besoins de capital. À mon avis, il reste du travail pour transposer ces résultats obtenus sur un horizon de plusieurs décennies en une vision réaliste des risques à un an.
Un autre problème rencontré par le marché est que les modèles utilisés dans la gestion des risques reposent encore assez fortement sur des données historiques : les assureurs essaient de déduire les fréquences et les intensités futures des pertes à partir des données des décennies passées. Cela ne fonctionne pas du tout en matière de risque climatique car les données passées ne seront en aucun cas un bon indicateur pour l’avenir.
Le champ des possibles est immense, et il existe une énorme incertitude quant à la façon dont les choses pourraient se passer. Face à cette multitude de futurs possibles, notre démarche chez Addactis® vise à déterminer si les événements extrêmes dans une région spécifique sont devenus plus – ou moins – probables par rapport à un monde sans changement climatique. Nous ajustons les modèles statistiques afin de capturer les effets liés au climat et les séparer des autres facteurs, tels que les facteurs socio-économiques, qui entraînent des pertes.
Nous aidons les assureurs à bien appréhender les hypothèses qui sous-tendent le modèle, afin que l’analyse et l’avis qui accompagnent tout scénario puissent générer une conversation utile – et aider à comprendre quel type d’événements devraient déclencher une action de gestion.
Notre conviction chez Addactis est que les modèles sont avant tout des outils pour nourrir une bonne discussion sur le champ des possibles et appréhender les multiples impacts du changement climatique sur le modèle économique de l’assureur.
Pour aller plus loin
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