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6ème rapport du GIEC : Etat des lieux du climat actuel et projection des impacts futurs

05/06/2023

Le Groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat – GIEC – a rendu son rapport de synthèse le 20 mars 2023, clôturant ainsi le 6ème rapport d’évaluation (AR6). Faisant suite aux précédents volumes sur « Les bases scientifiques physiques » en août 2021, « Impacts, Adaptation et Vulnérabilité au changement climatique» en février 2022 et « Atténuation du changement climatique » en avril 2022, ce rapport fait l’état des connaissances les plus actualisées et complètes sur le changement climatique.

Etat des lieux du climat et grands constats

Il est irréfutable que la hausse de la température globale s’est encore accentuée et qu’elle est directement due à l’activité humaine. Par ailleurs, l’ampleur des changements climatiques récents est sans précédent sur une aussi courte période depuis des centaines, voire des milliers d’années.

Etat des lieux du climat et grands constats

Les populations et les écosystèmes sont de plus en plus vulnérables. Cette vulnérabilité diffère en fonction des régions avec notamment des régions telles que l’Afrique subsaharienne, l’Amérique centrale et du Sud pour lesquelles les impacts sont substantiellement plus marqués malgré leurs faibles émissions de GES. Concrètement, ce sont des impacts sur l’accès à l’eau potable et à l’alimentation, ainsi que sur la santé qui sont observés, auxquels s’additionne une surmortalité due aux inondations, aux sécheresses et aux tempêtes (15 fois supérieure dans les pays très vulnérables par rapport aux pays moins vulnérables).

De nombreux phénomènes météorologiques et climatiques extrêmes dans toutes les régions du globe ont été observés au cours de la dernière décennie. L’atmosphère, les océans, la cryosphère et la biosphère ont subi des changements rapides et généralisés. Les preuves des changements observés dans les extrêmes tels que les vagues de chaleur, les fortes précipitations, les sécheresses et les cyclones tropicaux, se sont renforcées.

Pour finir, les émissions de gaz à effet de serre continuent d’augmenter fortement, mais deux fois moins vite que lors de la décennie précédente. En effet, le constat est clair : l’amélioration de l’efficacité énergétique n’a pas compensé l’augmentation globale de l’activité dans de nombreux secteurs économiques (principalement les énergies fossiles et l’industrie). Ainsi, les responsabilités de la hausse des émissions sont réparties de manière très inégale entre les différentes régions du monde, les secteurs d’activité mais aussi entre les plus hauts revenus et les autres.

Etat des lieux du climat et grands constats

Figure 1 – Quelques chiffres constatés en 2020

Progrès actuels et lacunes

Favorisés par la sensibilisation croissante du public et des responsables politiques, des progrès ont été réalisés dans la planification et la mise en place de mesures adaptées aux changements à venir. En effet, de nombreux pays et villes ont inclus des politiques et actions d’adaptation au climat dans leur stratégie. Toutefois, malgré les progrès accomplis, des écarts existent entre les secteurs et les régions et continueront à se creuser avec les rythmes actuels de mise en œuvre. Les principaux obstacles aux avancées sont liés au manque d’engagement des secteurs privés, des politiques et des citoyens. 

Les projections sur le possible climat du futur

Les groupes de travail du GIEC ont élaboré des scenarii de référence (Trajectoires socio-économiques communes – Shared Socio-economic pathways ou SSP), qui couvrent les possibles évolutions futures des facteurs anthropiques du changement climatique. Ces scenarii sont donc construits en partant d’hypothèses d’évolutions plus ou moins optimistes, et pour chaque futur alternatif un impact sur la température en 2100 est estimé. Ainsi, les scenarii centraux ci-dessous représentent des évolutions au cours desquels des pratiques durables ont été mises en place ou non, dans des contextes économiques et démographiques en croissance intense ou non.

Etat des lieux du climat et grands constats

Figure 2 – Scenarii centraux du GIEC

Toutefois, quel que soit le scenario d’émissions futures, la température de la planète continuera d’augmenter au moins jusqu’en 2050.

Les impacts seront amenés à s’intensifier et certaines conséquences du changement climatique, comme la montée du niveau de la mer, la fonte des calottes glaciaires et la perte de la biodiversité, seront irréversibles pendant des siècles, voire des millénaires. Les risques seront de plus en en plus complexes, combinés, en cascade et difficiles à gérer.

Etat des lieux du climat et grands constats

Figure 3 – Impact des futures émissions de carbone sur les températures à l’échelle de différentes générations

Si la tendance à la hausse des températures est certaine dans tous les scenarii, une certaine variabilité autour des températures moyennes reste à prévoir. D’une région à l’autre du globe, le réchauffement s’observera de manière hétérogène. Les conséquences directes que sont la perte de biodiversité, la baisse des rendements agricoles et les problèmes de santé liés au couple humidité/chaleur seront tout aussi hétérogènes d’une région à l’autre.

Limiter le futur changement climatique

Malgré une innovation technologique qui permettra de mieux s’adapter aux changements à venir, une transformation systémique sur de nombreux secteurs (bâtiments, transports, énergie, industrie…) est nécessaire avec un focus sur des solutions durables. Une coopération internationale importante permettrait d’accélérer les transformations à travers les différentes régions, notamment les plus vulnérables.

Par ailleurs, la « finance climat internationale » qui correspond à l’ensemble des financements mondiaux dédiés aux actions climatiques, a progressé mais reste insuffisante. La faible progression de ces financements limite ainsi la mise en œuvre d’options d’adaptation, en particulier dans les pays en développement. Les effets néfastes sur le climat peuvent réduire la disponibilité des ressources financières en encourant des pertes et des dommages et en entravant la croissance économique nationale. Aussi, une augmentation rapide et importante du financement des projets d’action climatique est nécessaire pour s’engager dans des scenarii de développement durable.

La fenêtre d’opportunité pour permettre un développement résilient au climat se rétrécit rapidement et plus la réduction des émissions sera tardive, plus les effets négatifs seront importants et coûteux. Ainsi des actions concrètes doivent être réalisées le plus rapidement possible et à une échelle globale puisque les options d’adaptation à disposition deviendront limitées. Une atténuation profonde, au cours de cette décennie réduiraient les pertes et les dommages futurs pour l’Homme et les écosystèmes et offriraient de nombreux avantages connexes, en particulier pour la qualité de l’air et la santé.

Etat des lieux du climat et grands constats

Figure 4 – Quelques chiffres

Les enjeux pour l’assureur

L’augmentation de la température moyenne mondiale et des risques physiques associés auront des impacts à tous les niveaux de notre société. Chez les entreprises d’assurances, une modification structurelle du risque de souscription est à prévoir, ce qui pourrait remettre en cause les stratégies commerciales. Ces impacts auront pour effet de refondre à terme l’équilibre entre les différents acteurs de l’assurance.

Les contraintes réglementaires liées aux projections climatiques prendront plus d’ampleur. En 2020 déjà, l’ACPR avait demandé la réalisation de stress tests pour mesurer l’impact du changement climatique à horizon 2050, en se basant sur les scenarii de référence de projections climatiques du GIEC. En 2023, c’est l’EIOPA qui demande aux assureurs de tenir compte de tous les risques liés aux changements climatiques à horizon 2100 dans leurs systèmes de gouvernance, de gestion des risques et leur ORSA.

En tant qu’acteur social important, l’assureur devra au préalable établir un diagnostic sur l’ensemble de la chaine de valeur assurantielle et mener les actions et études nécessaires pour intégrer les impacts non-identifiés à date. Ensuite, il sera important de projeter sur des horizons lointains et dans un environnement en constante mutation l’évolution des risques qui lui sont propres.

 

Si vous souhaitez en savoir plus sur la manière de traduire les risques climatiques en risques prudentiels, nos experts sont à votre disposition pour vous éclairer : www.addactis.com/fr/contactez-nous/

Cet article a été rédigé par nos experts :

Andrea EHUI

Andréa EHUI
Consultant – Modeling & Risk P&C

Annabelle GARRIGUE
Senior Manager – Modeling & Risk P&C

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Thibaut GILLIARD
Deputy Head of Modeling & Finance Life & Health

Elie MERYGLOD

Romain NOBIS
Manager – Modeling & Risk P&C